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 CAMPING

 

 

Première sortie camping et première expédition au bout du Monde : destination Boileux-au-Mont. Rendez-vous en terre inconnue. En pleine cambrousse. A quinze kilomètres de la maison mais à des années-lumière. Nous, pionniers d’un nouveau temps. Découvreurs de nouveaux espaces. Aventuriers de l’extrême, prêts à se coucher à la belle étoile et à se nourrir de racines et de vers de terre. Comme les hippies de Woodstock,  j’ai les cheveux longs et les idées folles (petite remarque au passage : en 1969, les hippies de Woodstock dansaient nus en fumant de la marijuana, faisait l’amour dans la boue, rêvaient d’un monde « peace and love » et criaient : « Paix au Vietnam ». Quarante ans plus tard, ils sont un peu plus dodus, beaucoup moins chevelus, prennent du Viagra et ont perdu toutes leurs illusions dans le crack boursier !).

 

Sur le chemin de l’aventure, on marche en file indienne en chantant : Un kilomètre à pied - ça use ça use - un kilomètre à pied - ça use les souliers. Avec mon bob sur le crâne, mon tee-shirt échancré, mon bermuda à fleurs bleues et tout mon barda sur le dos, j’ai tout l’air d’un aventurier. La meilleure façon de marcher - c’est encore la nôtre - la meilleure façon de marcher - c’est de mettre un pied devant l’autre…   

Au bout de deux heures, on atteint enfin la terre promise. Sous une chaleur accablante, on déballe notre paquetage :  piquets, maillets, oeuillets, sardines et tapis de sol. On plante les tentes près de la voie ferrée (à proximité du pont) avant de choisir notre place. Surtout pas aux extrémités. Trois inconvénients majeurs. Primo : on t’écrabouille  pour entrer ou sortir de la tente. Deusio : t’es la cible privilégiée des moustiques et des monos la nuit. Tertio : quand il pleut des cordes, t’es le premier noyé. Dans l’attente du premier feu de camp, on gonfle nos matelas pneumatiques. Comme les shadocks, on pompe, on pompe, on pompe. Au fur et à mesure, les boudins bleus s’enflent. Aussitôt qu’ils sont raidis, on pince l’accès à la valve et on enfonce sèchement le petit bouchon jaune de peur de voir tous nos efforts anéantis en une seconde.

 

Après le repas du soir, Christiane et Michel rassemblent assez de petit bois pour allumer le feu de camp. Très rapidement, on l’alimente à grands renforts de  ballots de paille, chipés dans le champ voisin. Vous verriez l’embrasement. Un véritable incendie. Tout le village illuminé s’apprête à flamber. Les flammes gigantesques qui montent au ciel nous dessinent des visages de mangeurs d’enfants et les filles, installées en cercle, reculent de trois bons mètres pour ne pas griller comme Jeanne d’Arc.

Les monos se cassent la tête pour nous offrir une première veillée sympa avec en vedette américaine Monsieur Coop (qui a toujours une bonne blague à raconter). Exemple : « Pourquoi les coqs n’ont pas de mains ?  Parce que les poules n’ont pas de seins. » Et puis, les jeux s’enchaînent : le tombeau de Napoléon, Pierre appelle Paul, la vache qui tache, la diligence… Parfois, tourmentée par le vent, la fumée s’affole, change de direction et se rabat sur nous. Plus de salive dans la bouche. Que de la cendre. Alors, on toussote tellement ça nous picote dans le fond de la gorge.

 

Au beau milieu de la veillée, lorsque la fraîcheur du soir descend, on récupère un pull dans la tente, vous savez : un de ces sous-pulls acryliques à col roulé, jaune orangé ou vert caca d’oie que vous avez dû porter aussi et qui vous grattent la peau quand vous n’avez rien en dessous (le vôtre, peut-être était-il vert olive ou rouge sang-de-bœuf ?). Pour l’enfiler, c’est la galère parce que votre tête est toujours trois fois plus grosse que l’encolure, alors pour l’enfoncer : faut saquer dessus comme un malade. Pour le retirer, c’est plus compliqué encore que d’ôter des bottes de caoutchouc les jours de pluie (sauf qu’au lieu des pieds, c’est la tête qui dérouille). A chaque fois, vous êtes à deux doigts de vous étrangler le cou et de vous arracher les oreilles ? Après, vous avez les cheveux tout électriques qui se dressent comme ceux de Desireless. Parfois, c’est curieux : on se bat avec nos vêtements comme s’ils étaient vivants. On dirait  même qu’ils se rebiffent (manquerait plus qu’ils pensent).

A la fin de la veillée, le feu s’amenuise.  Plus il faiblit et plus on s’en approche. Le tiot Moineau (un petit moineau bien de chez  nous, pas très friquet) tente de le ranimer en le couvrant de petit bois. Moi, je scrute le ciel à l’affût d’une étoile filante ou d’une soucoupe volante (on a beau m’expliquer que certaines étoiles sont éteintes depuis des millions d’années, je n’arrive toujours pas à comprendre pourquoi elles brillent encore). Pourquoi,  pourquoi, pourquoi ? Parfois, je me pose trop de questions et à trop m’en poser, je suis fatigué d’être moi-même. Mémé du Moulin, elle a sa réponse toute prête. Quand je lui dis : pourquoi ceci, pourquoi cela, elle répond : « Par s’ queue c’est pas par s’ tête ! » Après ça, j’ai plus qu’à me taire (et je reste bête).

 

La Compernole jette deux ou trois patates dans la braise encore chaude. Furieux, le feu crache de la fumée et nous picote les yeux. Après avoir avalé notre patate avec une saucisse grillée moutardée dans du pain, c’est l’heure d’aller se coucher. Dudu craque une allumette, l’approche de la mèche, dose l’intensité de la lumière afin d’éclairer toute la tente. La lampe répand une clarté jaune et chaude et sa lueur vacillante fait trembler nos ombres sur la toile. Avant l’extinction des feux,  on chahute et on rit. Qu’est-ce qu’on est bien.

 

Après Boileux-au-Mont, les expéditions en terre inconnue se sont multipliées, plus agréables les unes que les autres : Thièvres, Etrun, Berles-au-bois, Maroeuil (à la lisière du bois, pas loin de la fontaine Sainte-Bertille[i]), Acq (à deux doigts des deux pierres[ii]) et surtout Warlus, dans une prairie verdoyante, entourée d’arbres, à l’ombre d’une vieille bâtisse en pierres blanches.

 

 Un beau jour ou peut-être une nuit - Près d’un lac-Je m’étais endormi - Quand soudain semblant crever le ciel - et venant de nulle part - Surgit un aigle noir … 

 

Premiers secrets, premiers émois et moi et moi, autour du feu de camp à fixer secrètement son visage et ses longs cheveux bouclés noirs. Intrigué. Subjugué. A cet instant précis, je veux lire dans ses pensées. Deviner le sujet de ses songes. Je ne sais pas pourquoi mais une partie de moi l’aime déjà beaucoup et mes yeux en disent long sur mes intentions. Je le fixe pour mieux accaparer son attention. Ça, c’est un de mes pouvoirs magiques, quand je fixe quelqu’un, il finit toujours par capter mon regard persuasif. Sans blague, c’est vrai ! Ca ne rate pas. Il plante ses yeux dans les miens et esquisse un sourire discret. A sa façon de promener son regard sur moi, on dirait qu’il s’intéresse à ma personne. Si ça tombe, il m’apprécie un peu. Pas sûr. Moi, je l’aime déjà beaucoup, il faut être miro pour ne pas s’en apercevoir. A me suffire de le regarder, mon cœur bat follement et ces battements affolés semblent provenir des ailes d’un oiseau enfermé dans cette petite cage de muscle et de sang battant la chamade. On ne cueille pas l’amour comme on cueille sur le bord du chemin, un oiseau qu’on met en cage chante Nana. Moi, je lui chanterais bien : « Je voudrais dormir près de toi » de Frédéric François.  Je vois que vos têtes se dé-com-po-sent rien qu’à entendre le nom de Frédéric François. O.K., c’est pas Ferrat chante Aragon : « Que serais-je sans toi » ou « Aimer à perdre la raison » et alors ! Moi j’aime bien cette chanson parce qu’elle exprime exactement mes sentiments du moment. Il y a comme ça, des refrains de chansons populaires qui reflètent parfaitement vos états d’âme. C’est le cas (ne riez pas, j’ai même acheté son 45-tours). Si vous insistez, je vais vous interpréter « Laisse-moi t’aimer toute une nuit » de Mike Brant  et vous aurez gagné. Parce que moi des chansons comme ça, j’en connais des tonnes (je l’ai déjà dit et je le répète). Vous aussi, peut-être, que vous associez certainement à des bons souvenirs (de Mike, je préfère quand même : « Dis-lui »).

 

La deuxième nuit, fort de son adhésion silencieuse, nos deux duvets n’en font plus qu’un. Alors, rapidement se couler, coulisser, se glisser dans ce duvet commun. Doux comme un bonheur divin.  Je suis heureux, ça crève les yeux. Heureux, ravi, comblé. Pas envie de dormir. Alors, toute la nuit, on a parlé, parlé, parlé de tout et de rien et au petit matin, on s’est assoupis, mon corps contre le sien, comme deux petits animaux qui cherchent à se réchauffer. Un peu comme un refuge contre le froid de l’aube. Et puis après, je l’ai juste enlacé. Pas de baiser ni rien. Sauf quelques gouttes de lait caillé dans le duvet (évidemment, ça reste entre nous). Le lendemain matin, vivre dans l’attente de la nuit prochaine.

 

Troisième nuit.  Mes mains tremblent un peu. Pas beaucoup  mais un peu. Respirer son odeur. Déranger ses cheveux. Demander sans rien demander. La chaleur monte dans la nuit. Une moiteur animale. Je brûle d’envie de me serrer contre lui. De passer un bras autour de sa taille et de sentir dans mes doigts son cœur battre. C’est curieux, on dirait que son corps est fait pour le mien. Alors, nouer mes jambes aux siennes, un genou contre sa cuisse. Explorer ses contours. Et puis poser mes lèvres sur les siennes et sentir sa bouche vivante et chaude répondre à mon premier baiser osé. Fugace, fugitif, éphémère. Après, baiser ardent, fervent, fougueux. Enflammé, endiablé, passionné. Rien à dire. Amour entre deux mêmes qui s’aiment. Sentiments hyper forts. L’amour donné un jour est donné pour toujours. Je voudrais éterniser cet instant. Si vous voulez une définition du bonheur, c’est ça : son corps contre le mien. Après c’est carré blanc. Top secret. Sauf qu’au petit matin, j’ai la gaule. Mon Général !

 

 Sur le coup de sept heures, le bavardage matinal des oiseaux nous réveille. Let the sun shin. Un rai de lumière filtre à travers la toile. Meuglements de  vaches dans la pâture voisine. Emerger de la tente à quatre pattes, hébété de sommeil. Pointer le museau. Respirer la fraîcheur du matin. Se dégourdir les jambes, les sandalettes mouillées par la rosée du matin (vous savez ces sandalettes à lanières qui laissent apparaître les orteils).

Dans le lointain, le petit tas de cendres fume encore. Je tourne autour en poussant du pied les résidus de branches vers l’œil jaune et rouge central. Des étincelles jaillissent vers le ciel et retombent aussi vite en flammèches. Après, je me débarbouille  et me rince la bouche au robinet du jerrican. Dudu va chercher le lait à la ferme et Simon, le pain chez le boulanger voisin. C’est vraiment un pur bonheur que de tremper les baguettes croustillantes dans le lait chaud, mélangé au chocolat Banco. A l’air libre.

 

Au milieu de la journée, alors que le soleil sèche la rosée du matin, on enfourche nos bécanes pour assurer le ravitaillement de la journée (parce que se nourrir de  racines et de vers de terre, ça va bien un temps). Sitôt franchi le pont, on file à toute berzingue, le nez dans le guidon. Mano a mano avec Moineau. On se tire la bourre mais je ne suis ni rouleur, ni grimpeur, ni sprinter. Moyen en tout et génial en rien. En plus, on ne peut pas dire que ma position aérodynamique, avec mon bob sur le crâne et mes mains sur les cocottes, facilite ma progression. Alors Merckx lâche Poulidor facilement. Avec son vélo de femme bien trop grand pour lui, Irénée pédale, bouche ouverte, comme un damné et toujours en danseuse. Il est largué dès la première bosse. Il y a des évidences incontournables : une descente est une pente quand on la grimpe et Irénée l’apprend à ses dépens. Il en a plein les cannes. Arrivés à la supérette des Hauts Blancs Monts, on accomplit nos emplettes en pilotant le caddie comme Jim Clark sa lotus sur le circuit de Montlhéry. On s’approvisionne en crème Mont Blanc, raviolis, boîtes de corned-beef et paquets de chips. Puis on fait la queue à la caisse. Vous avez remarqué que dans les files d’attente, la file d’à-côté avance toujours plus vite que la vôtre. Ca ne loupe pas. Merde.

Sitôt rentrés, les estomacs gargouillent alors la Compernole prépare la tambouille (c’est son tour). Elle pose une casserole d’eau, y plonge les saucisses Garby à l’eau frémissante et les sert avec des lentilles. Dans l’autre groupe, Simon prépare un steak haché avec des pommes de terre sautées. Il rajoute une tonne  de mayo sur son steak archi poivré.  Jean-Jacques dit que le poivre, c’est du sel qui pique.  Pouillaude dit pire. Il dit que le poivre brûle les lèvres tout de suite et plus tard le cul. A la fin du repas, on fait tourner une cuillère pour savoir qui effectuera la vaisselle. Après, c’est sieste et puis jeux avec les monos.

 

La chaleur accablante de certaines après-midi nous contraint à rechercher les coins d’ombre. Quand il fait une chaleur à crever, on s’amuse à arroser les filles avec des pistolets à eau en plastique. Les monos s’invitent à la fête en s’armant de seaux. C’est douche froide pour tout le monde et partie de rigolade assurée. Et puis, vers seize heures, l’oreille collée au transistor, on suit les exploits des coureurs du Tour de France. « Ici la route du Tour, Poulidor s’est échappé » Youpi ! « Il est sur le point d’être rattrapé » Merde. Moi, depuis la victoire de Gimondi en 1966, j’en connais un rayon sur le Tour et c’est pas du bidon (vous pouvez m’interroger). Les après-midi de mauvais temps, on joue à des jeux de société sous les tentes en écoutant She’s a lady de Tom Jones, Eloïse de Barry Ryan et Tu veux ou tu veux pas de Zanini. Avec Moineau, je veux toujours. Et quand je veux une chose, je le veux si fort que je l’obtiens. Je dois être un gros obsédé, possédé du démon avec des pouvoirs magiques insoupçonnables.

 

En fin d’après-midi, a lieu le grand match de foot. Notre équipe joue torse nu et l’équipe de Simon, en maillots de corps. On est Lens, ils sont Reims. Bébert, sur les rotules, capitule rapidement et Simon, myope comme une taupe, joue les passoires. Pas grave, c’est le goal adverse. Les filles commentent nos exploits avec des regards qui en disent long sur leurs envies. Les filles, faut pas chercher à comprendre, c’est soit amoureuses, soit jalouses (et quand c’est amoureuses, ça veut se marier et avoir plein d’enfants).

 

Avant le repas du soir, les parents de Christiane nous rendent visite. Sa maman ne vient jamais les mains vides. Elle amène toujours avec elle un paquet de bonbons. Du coup, quand je la vois, je l’appelle Madame bonbons. Après en avoir choisi un (même deux), on dit merci. Madame Bonbons laisse filer sur ses lèvres un sourire doux et nous offre son silence en retour. Elle affiche à chaque fois une bonne humeur discrète et je sens toujours dans son regard de la bienveillance. Son mari, c’est pareil. Le soir, pour aller plus vite, on réchauffe une boîte de raviolis dans une casserole dont le fond accroche. Pas grave, c’est bon.

 Après, à l’heure où le soleil rougeoyant enflamme l’horizon, on profite de la douceur du crépuscule pour écouter le silence des ténèbres. Jean-Jacques demande pourquoi le soleil est rouge quand il se couche ? Chut !  Je n’en reviens pas de tant de bonheur. Parfois, avant de rejoindre les tentes, on fait le tour du village. Une fois,  Dudu a mitraillé d’oeufs un convoi militaire qui traversait Warlus. Moins une, il nous déclarait la guerre.

  

Cette nuit, ce n’est pas le moment de se dégonfler. Ca fait deux jours qu’on ronge notre frein. Christiane et Michel nous l’ont pourtant promis : on va aller voir les feux follets à minuit pile. Paraît qu’ils hantent les cimetières la nuit. Privés qu’on a été deux fois à cause d’Irénée. Alors aujourd’hui, c’est la bonne, sauf que bibi lolo (c’est moi), il a le trouillomètre à zéro. La peur dans les boyaux. Il est minuit, docteur Schweitzer. Ca y est, l’expédition macabre marche en direction du cimetière. Groupée, serrée, collée. Dans la rue déserte, les sens sont en alerte. C’est curieux le pouvoir qu’a la nuit de changer les choses les plus anodines en étrangeté. Le gémissement du vent dans les arbres ajoute à cette atmosphère lugubre et menaçante. La Compernole parle, parle, parle. C’est sa façon à elle de masquer sa trouille grandissante. Un aboiement au loin. Le cimetière se rapproche. On échange quelques plaisanteries, histoire de se rassurer. Franchissement de la grille. A pas de loup, on pénètre dans l’allée centrale. Silence de mort. Je voudrais bien vous y voir ! On marche entre les tombes. Alignées, on dirait des petits lits d’un dortoir en plein air. Quand je pense qu’à l’intérieur, il y a des corps allongés qui ont aimé, ri, bu et chanté, ça me fait tout drôle. On  balaie l’allée du regard. Rien. Si ça continue, le Simon va faire dans ses marronnes. « Les feux follets, faut les repérer sans s’affoler » qu’il a dit Michel mais lui s’est bien gardé de nous accompagner. Une soudaine envie de pisser me contracte le bas ventre (vous avez remarqué que ces choses-là arrivent toujours au mauvais moment). Tant pis, je me retiens. Tout à coup, à quelques pas de nous, un filet de lumière cisaille le sol. Après avoir lâché un rire incongru, la Compernole est clouée sur place. Simon n’émet plus le moindre son et Dudu a les yeux ronds comme des soucoupes. Il ne nous en faut pas plus pour décamper vite fait. Sur le trajet du retour, on n’arrête pas de plaisanter en essayant de percer le mystère. Chacun y va de son explication. Deux jours plus tard, Michel vend la mèche (c’est le cas de le dire). C’est lui qui l’avait allumée.

 

Au retour, après l’ultime ronde de Christiane, on profite de l’état de décomposition des filles pour enfiler des masques de sorcière  et se diriger sur la pointe des pieds vers leur tente. On rit comme des fous en anticipant la réaction de la Compernole. Ca ne loupe pas. Surprise en plein sommeil, elle pousse un cri de film d’horreur. Nez à nez avec Frankenstein, elle n’en aurait pas poussé un aussi fort. Sûr qu’elle a cru qu’un fantôme l’appelait des ténèbres. On s’étrangle de rire avant de filer à toutes jambes.  Une heure plus tard, on rit encore tandis que les filles méditent leur vengeance. Elles connaissent mon point faible : je suis super chatouilleux des pieds. Ça ne rate pas. Le lendemain, l’expédition punitive a lieu lâchement à l’heure de la sieste. Pas le temps de réagir que le commando se jette sur moi, me saisit  les poignées et me chatouille à l’endroit stratégique. Si ça continue, je vais crever de rire, pareil que Fernandel dans François 1er lorsque cette satanée chèvre lui lèche la plante des pieds lors d’une séance de torture mémorable. La Compernole rit comme une otarie. Je ne dois mon salut qu’à l’arrivée de Moineau.

 

Nous, en camping, ce qu’on craint le plus : ce sont les orages. Paraît que pour éviter la foudre, faut s’allonger par terre et s’éloigner des objets pointus.  Moi, aussitôt que les éclairs fusillent le ciel, je cours comme un lapin me mettre à l’abri. Paraît aussi que le tonnerre est la voix des ancêtres courroucés par certains comportements humains. Je crois qu’Irénée a dû vachement les contrarier pour que le ciel enrage à ce point. En l’espace de quelques secondes, il s’assombrit et se zèbre d’éclairs. Dudu dit que quand des éclairs cisaillent le ciel, c’est que le bon Dieu prend la Terre en photo. Nous, on n’a pas le temps de poser. En toute hâte, on plante une patate à la pointe du piquet en guise de paratonnerre et on se réfugie vite fait dans nos tentes. Aussi sec, il se met à tomber des cordes : une pluie battante qui martèle furieusement la toile. Calfeutré dans le duvet, j’ai une envie pressante de pisser (encore). J’en parle parce qu’à lire certains bouquins ou regarder certains films, on pourrait croire que les héros n’ont jamais d’envie pressante. Avez-vous déjà vu Tarzan faire pipi entre deux lianes ou Jane accroupie derrière un baobab ? Non. Normalement, si les héros sont des êtres humains comme vous et moi, ils doivent bien avoir des besoins naturels à satisfaire à un moment donné de la journée. Moi, j’ai une envie pressante et je le dis. Dans la vraie vie, t’as plutôt intérêt aussi à assurer la grosse commission. Pour s’être abstenu (en raison de l’état des toilettes) en colo à Trébeurden, à son retour à la maison, Philippe ne pouvait plus marcher. Paralysé qu’il était. Fallait le voir s’accrocher désespérément aux barreaux du parc pour en effectuer le tour. Il a failli mourir. Ne vous marrez pas, c’est pas des blagues. Qu’est-ce que j’aurais fait sans lui ?

Faut être maboule pour sortir par un temps pareil mais que voulez-vous, je ne peux pas dire d’un côté que les héros des bouquins ne font jamais pipi et ne pas faire quand j’ai envie. Alors, je sprinte sur le sol détrempé vers le premier arbre venu. Le concours de celui qui pissera le plus loin est remis aux calendes grecques. Je ne vous parle même pas du concours de branlette, c’est vraiment pas l’heure de se cailler le pipi. Vous ne savez peut-être pas mais « se cailler le pipi » signifie « se masturber » au Québec (Le Général de Gaulle connaît bien l’expression : il y est allé une fois et il a dit : Vive le Québec libre). Pour « se masturber, les Québecquois disent aussi : « se poigner le moine » (!), « se hâler la broche »  ou encore « faire marcher son p’tit moulin » mais je m’égare un peu.

Quand je réintègre la tente, la toile s’est tellement creusée que l’eau dégouline sur les duvets. On a le cul trempé. Le lendemain matin, pas un nuage, on dirait que le soleil dispose du ciel pour lui tout seul. Tant mieux, on fait sécher ce qui peut l’être.

 

Certaines nuits, la chaleur étouffante livre le campement aux moustiques. Les moustiques font partie des insectes les plus agaçants que je connaisse parce qu’ils cherchent toujours à vous mordre et à vous sucer le sang. Simon le sait.  Pourtant, il a oublié de fermer la tente. Alors, ces bébêtes antipathiques, planquées en habits de camouflage, nous attendent de pied ferme. Pas la peine de parlementer avec les moustiques, ils sont plutôt hermétiques au langage diplomatique. N’ont qu’une obsession en tête : piquer. Leur tactique, elle est simple, c’est l’attaque à outrance. Frénétique, hystérique. A peine, entre-t-on dans la tente que ces vampires lilliputiens nous attaquent. On a beau se réfugier sous les duvets, ils insistent. Impossible de leur expliquer qu’il y a d’autres manières d’aborder les gens. Comprennent rien. A ce moment précis, je vous jure que j’aimerais bien me transformer en chauve-souris pour les réduire en bouillie. Mais je ne suis ni chauve (ça viendra), ni souris et encore moins chauve-souris. Alors, je fais ce que je peux comme Jonathan face à Dracula. Ca y est, ça m’irrite et ça me gratte. C’est sûr, l’un d’entre eux m’a piqué l’omoplate.

A propos des chauves-souris, ne croyez surtout pas tout ce qu’on raconte sur elles. La nuit, elles ne s’accrochent pas à vos cheveux, vu qu’elles sont dotées d’une espèce de radar qui leur permet de voler dans l’obscurité totale sans même vous percuter. Et puis, entre nous, elles ont d’autres chats à fouetter. Franchement, pourquoi l’homme se croit toujours obligé de ramener tout à lui ? Non, la nuit, la chauve-souris vit sa vie de chauve-souris, tout simplement, comme ces millions de petites bêtes visibles et invisibles, insignifiantes et insaisissables qui peuplent la nature et qui marchent, rampent, sautillent ou volent sans se soucier de nous (comme elles ne prennent pas la pilule, faut pas s’étonner que toutes ces petites bébêtes pullulent !).

 

En été, il n’y a pas que les moustiques qui piquent. Il y a les abeilles et les coups de soleil. Parce que le soleil, il a beau être à 150 millions de kilomètres de mon dos, quand il tape fort, il me  rôtit carrément la peau. Faut voir comment mes épaules sont rouges. Avant de dormir, j’ai beau me badigeonner de crème NIVEA, je ne sais plus sur quel côté m’allonger. Pour les piqûres d’abeilles, paraît qu’il faut extraire le sac à venin et laver la peau. Facile à dire. Pour les piqûres de moustique, tante Berthe recommande d’appliquer de l’eau vinaigrée ou alors de frictionner avec du persil ou des poireaux ! Elle dit que pour les morsures de vipères, c’est la mort assurée (y a pas de vipères dans la région, ça tombe bien).

 

Le dernier soir, Michel anime le jeu de La couverture. Il recouvre Moineau d’une couverture et annonce la couleur :

- Moineau, tu vas devoir nous montrer quelque chose que tu as sur toi et que j’ai noté sur un carton. Tant que tu ne nous as pas montré ce qui est écrit sur le carton, tu continues. On te répondra par oui ou par non. O.K ?

- Ouais.

Sur ce, Michel nous présente le carton sur lequel la chose en question est inscrite. Eclats de rire. Bientôt, plus rien ne remue sous la couverture. Moineau gigote et glisse une chaussette. Le mono s’en empare.

- Est-ce que c’est le mot « chaussette » qui est écrit sur le carton ?

- Non, hurle-t-on, en poussant des petits cris d’excitation.

Moineau retire alors sa montre et nous la montre. Le même « non » jubilatoire retentit à la vue de l’objet. Il enchaîne avec sa chaîne. Négatif. Il agite son polo. Toujours niet. Il ôte maintenant son short, consent à abandonner son slip en l’agitant timidement comme un guerrier agiterait un drapeau blanc avant de capituler. Les filles sont en transe. Elles l’imaginent nu comme un ver sous la couverture (moi aussi). Penaud, il passe sa tête et dit : « j’ai plus rien » « Tu en es sûr, Moineau ? »,  interroge le mono.

- Ben ouais !

- Et la couverture, elle n’est pas sur toi ? C’est la couverture que tu devais nous montrer.

Drapé dedans, Moineau récupère ses affaires et se rhabille à l’écart (la queue entre les jambes).

 

Après la veillée,  les monos organisent un jeu de nuit. La règle est simple. Michel part en cavale dans le bois, dix minutes avant tout le monde, et nous signale sa position, de temps en temps, par trois coups de sifflets brefs aussitôt lâchés à ses trousses. Le premier de la meute qui lui met la main dessus a gagné. Armés d’une lampe de poche, on s’enfonce dans la profondeur du bois, à la recherche du fugitif. Rapidement, le vent se lève et se déchaîne, s’engouffrant dans la voilure des arbres. Un vent terrifiant. Des masses gigantesques se meuvent et s’agitent devant nous. On dirait que le bois est peuplé d’ombres étranges. Moineau est ma boussole. Je le suis les yeux fermés. Au bout de dix minutes, on décide de rebrousser chemin et d’attendre le reste de la troupe dans la tente. Histoire de s’offrir du bon temps. C’est réussi.

 

Quatrième jour. Le jour se lève. Le rêve s’achève. Debout les gars ! Réveillez vous ! Il va falloir en mettre un coup. Fin du voyage, on plie bagage. Sitôt rentrés à la maison (le samedi midi), on s’écroule sur le lit et on sombre dans un sommeil comateux de vingt-quatre heures. Au lever, je n’arrête pas de penser à lui. C’est bizarre, ces choses-là. Il me manque. Tout en lui me manque. Je l’imagine le jour, la nuit. La nuit surtout. Il trotte dans ma tête et devient le seul à occuper ma mémoire.

Le dimanche midi, à peine réveillé, je le suis en pensée. Je devine sa chambre, l’imagine  en train de déjeuner, de taper dans un ballon et de rire. Je crève d’envie de le rejoindre. Moi, je sais bien qu’il faut forcer le destin, prendre les choses en main sinon on obtient rien. Alors, j’enfourche ma bécane et roule à mille à l’heure  vers le bonheur. Je fais le tour du quartier. Passe, repasse et re-repasse devant la grille de sa maison. Personne. Je poireaute un bon quart d’heure à vingt mètres de l’entrée, consulte l’heure à ma Kelton bleue. Le guette autant que je l’espère.

Quand enfin il apparaît, je pédale à sa rencontre et m’étonne de tomber sur lui. C’est une de mes techniques préférées : faire semblant d’être étonné. J’invoque la malice du hasard. Tu parles ! Je sens à l’intérieur de ma cage thoracique un petit oiseau palpiter. Ce doit être mon coeur. Il fait boum boum. Je lui demande de se calmer mais il ne veut rien savoir. Moi, en face de lui et c’est déjà la définition du bonheur. Comment calmer mes ardeurs ? Je l’invite à jouer au foot dans son garage. Attention, un but, un gage. « Je pourrais faire ce que je veux ? » Wouah ! Moi, un truc comme ça, faut pas me le dire deux fois. Je me concentre hyper fort (comme du temps où Murielle posait dans les champs de blé). But ! Balle au centre. Ouais ! Faire ce que je veux et que, si ça se trouve, je pourrais peut-être faire mieux encore. Waouh ! Génial, non ? Immense performance. En moins d’un quart d’heure, j’aligne dix buts d’affilée et fais ce que je veux à chaque but marqué (c’est la règle).  Moineau tolère sans colère, plutôt amusé. Ne pas abuser des bonnes choses (encore que je me débrouille toujours pour faire durer ces choses-là). Quand c’est fini, je retarde par tous les moyens le moment de lui dire au revoir. Puis le quitte à regret.

De retour à la maison, j‘écoute sur mon petit transistor  grésillant la retransmission des matches de foot, particulièrement attentif à l’évolution des scores de Lens, Lille et Valenciennes (un peu chauvin. Si peu). Valenciennes obtient un méritoire match nul 2-2 à Nungesser contre Nantes (le futur champion de France).

 

Cinq mois plus tard, on fête Noël à Saint-Christophe. C’est le temps des copains et de Martin Circus ! Je m’éclate au Sénégal  et bien plus encore : ici et maintenant.  Jeux de cache-cache dans la nuit ! Je le cherche. D’un signe de la main, il m’appelle. Je prends son geste pour une invitation alors je cours me blottir dans sa cache. Mon cœur tambourine dans ma poitrine. Encore une fois, il fait boum boum. Je ne sais pas pourquoi mais je décide subitement de coller ma bouche contre la sienne. Il y a parfois des gestes dont vous n’êtes pas tout à fait maître (c’est le cas). Moi, vouloir d’un coup être masseur, malaxeur, la main de ma sœur, adoucisseur, revitalisateur, enfin, tout quoi ! Obligé. Avec plein d’impatience dans les mains. Je vous laisse imaginer la suite. Je sens même comme un incendie s’allumer dans mon ventre. Avant de se faire gauler, on partage un rire gamin câlin taquin. Je crois qu’on rit tous les deux du seul plaisir d’être à deux. A ce moment précis, je peux dire que ma vie est beaucoup plus belle que la vie de n’importe quel héros de n’importe quel film vu à la télé.   

A quatre heures du matin, je regagne la maison à vélo, un peu pompette. Même si la dynamo ronronnante ralentit ma progression, aux abords du cimetière, le nez dans le guidon, je roule à la vitesse de la lumière et dépasse le mur du son. Au saut du lit, des marteaux cognent dans mon crâne. J’ai un goût de bile dans la gorge et une barre au-dessus du front. J’ai dû picoler un peu trop.

 

Le samedi matin, au Centre aéré, comme je ne vais pas à la piscine, Moineau reste avec moi et on multiplie les parties de ping-pong acharnés sous le préau. Je ne vais pas à la piscine parce que je ne sais pas nager. J’ai appris tardivement (à seize ans, à Dainville chez un particulier). La brasse uniquement. Le crawl, c’est trop compliqué : faut mettre la tête sous l’eau, respirer par la bouche et boire la tasse de temps en temps. Moi, entre l’eau chlorée des piscines et l’eau immonde de la mer, j’ai choisi de ne rien boire du tout, alors je nage la tête hors de l’eau et la bouche fermée. Remarquez, goûter l’eau des marais n’est pas non plus très conseillé. J’en ai fait l’amère expérience au marais de Heilly lors d’une partie de pêche avec Nanot et Philippe.  Je vous raconte.

 En fin d’après-midi, alors que Nanot avait vidé l’étang de tous les poissons et s’apprêtait à plier les gaules, debout sur le ponton, j’ai voulu farcer Philippe. J’ai pointé du doigt la surface de l’eau en criant : « Regarde, le gros poisson devant toi ! » et puis j’ai reculé d’un pas. Le pas de trop. Plouf ! Tombé à l’eau, le yéyé. Coulé à pic comme une brique. Touché le fond. Boire la tasse. Mourir une seconde et puis, parce qu’il n’est pas question de mourir plus longtemps, refaire surface. Nanot en profite pour m’empoigner par le paletot et me claquer sur le ponton comme un vulgaire sac de patates. Opération de sauvetage réussie sauf que je pue la vase à dix kilomètres à la ronde et que j’ai l’air d’un chien mouillé. J’ai horreur de l’odeur des chiens mouillés (et de l’odeur des chats énurétiques aussi, d’ailleurs). Sur le chemin du retour, Nanot m’asticote sévère (plus la peur que la colère, je crois).

C’est sûr que si Nanot ne m’avait pas sauvé des eaux, il aurait eu ma mort sur sa conscience toute sa vie (Berlette) et l’E.S. Agny aurait été privée d’un de ses atouts majeurs !

 



[i]Selon une tradition, SAINTE-BERTILLE aurait fait sourdre cette fontaine située sur la chaussée Brunehaut pour désaltérer ses moissonneurs. Chaque année, le 8 octobre ou le dimanche suivant, un pèlerinage attire un nombre de fidèles venus y puiser de l’eau pour se soigner les yeux. Ils en prélèvent avec la main pour se frotter directement avec ou bien utilisent un flacon afin d’en emporter pour les malades. Lors des tempêtes de 1990, l’arbre qui se trouvait à côté est tombé sur le petit sanctuaire en épargnant la statue de la sainte. 

 

[ii] LES PIERRES D’ACQ : Les deux menhirs en grès, connus sous différentes appellations : pierres d’Acq, pierres jumelles ou pierres du Diable, sont situés sur le hameau d’Ecoivres, à proximité du Mont-Saint-Eloi et du village d’Acq. Distants l’un de l’autre de 9 mètres environ, le plus petit bloc mesure 3 mètres de haut et le plus grand 3.3 mètres. Pour expliquer l’existence et l’emplacement de ces deux pierres à cet endroit, trois hypothèses sont avancées.

Première hypothèse : il s’agirait de pierres levées celtiques datant de - 4000 à -3000 avant J-C. Extraits des collines voisines, on pense qu’elles  auraient servi de cadre à des rites solaires car elles sont orientées sur un axe de soleil levant.

Deuxième explication : ces pierres auraient été dressées, en 862, par Baudouin Bras de Fer, pour perpétuer le souvenir de deux victoires qu’il aurait remportées en ce lieu sur le roi de France : Charles le Chauve. Baudouin enlève Judith, fille du roi Charles, pour en faire son épouse. Le père mécontent prend les armes. Vaincu,  il est contraint d’accorder la main de sa fille à son vainqueur après l’intervention du Pape. Cette thèse est accréditée par les Chroniques de l’abbaye de Saint-Eloi. Des fouilles pratiquées vers 1820 permettent d’exhumer des cercueils en grès brut renfermant des armes en fer. Ces sépultures, probablement mérovingiennes, étayent cette légende.

Enfin, une autre légende, toute aussi répandue, affirme que ces deux pierres ont été jetées de rage par le Diable qui n’arrivait pas à terminer la chaussée Brunehaut à temps. C’est sans doute pour cela que les Pierres d’Acq sont aussi connues sous le nom de pierres du Diable.

La légende raconte que Le Diable aurait proposé à la reine Brunehaut de lui construire une route d’Arras à Thérouanne. Un pacte est conclu : le travail sera effectué en une nuit. S’il est terminé avant le premier chant du coq, l’âme de la reine lui appartiendra. La reine trouve une ruse pour sauver son âme. Juste avant le lever du jour, alors que la route n’est pas encore achevée, la reine réveille son coq et le fait chanter. Furieux de la supercherie, le Diable ramasse deux énormes pierres sur le chantier et les jette au sol.